Moyennant l'observation
de ses engagements, tout possesseur de fief exerçait sur le domaine
à lui concédé des pouvoirs étendus, ceux que l'Etat autrefois
avait exercés, mais dont il s'était peu à peu dépouillé en accordant
aux seigneurs des immunités, c'est-à-dire le privilège de faire
sur leur terre ce que lui-même avait coutume d'y faire : administrer,
rendre la justice, lever des taxes.
Chaque fief formait ainsi un véritable gouvernement, où l'autorité
d'un homme s'était substituée à celle de l'Etat.
Le seigneur administrait
: il faisait des règlements, assurait la police, surveillait les
marchés et les foires, entretenait les routes et les ponts.
Parfois il battait monnaie.
Il rendait la justice et infligeait des amendes : si les petits
seigneurs ne possédaient que le droit de basse justice,
c'est-à-dire la punition des délits de peu d'importance (querelles,
ivresse, vols), les seigneurs plus considérables s'étaient arrogés
la haute justice, le droit de poursuivre les grands
coupables, notamment les assassins ; ils avaient sur leurs terres
un pilori où l'on exposait les condamnés et où on
les battait de verges, et des fourches patibulaires,
où on les pendait.
Enfin, le possesseur
de fief percevait des impôts : taxes sur les paysans, droits sur
les marchands qui circulaient à travers le pays, surtout la
taille, qu'il levait à sa volonté sur tous les habitants,
toutes les fois qu'il avait besoin d'argent.
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